Un sujet toujours complexe
Un éleveur du canton d'Arnay-le-Duc évoque les dégâts de sangliers sur prairies : une problématique qui n'a jamais été simple à traiter durant toute sa carrière.

Il est aujourd'hui retraité mais donne encore quelques coups de main à Dominique, son frère. Michel Boulmier, rencontré la semaine dernière à Clomot, accepte volontiers de parler de dégâts de gibier, une « notion » qu'il connaît bien : « Ici nous sommes en zone noire, les populations de sangliers et donc les dégâts sont globalement en constante augmentation, je dirais depuis quinze ans. Avant, il y avait quelques trous par-ci, par-là, mais rien de comparable à la situation d'aujourd'hui ».
Des chardons en pagaille
Si, en grandes cultures, la gestion de cette problématique trouve « plus ou moins » ses solutions, celle des dégâts dans les prairies est beaucoup plus complexe : « dans les champs, il y a souvent de la casse deux semaines avant la récolte. Les problèmes sont assez facilement identifiables et quantifiables. La parcelle, elle, est remise d'aplomb après la moisson. Dans les prés, c'est tout autre chose… Les sangliers se manifestent sur une période beaucoup plus longue et aléatoire, de septembre à avril. Il est beaucoup plus compliqué d'estimer les dégâts et de prendre une décision pour intervenir ». La réparation du sinistre est tout aussi délicate selon Michel Boulmier : « après la visite de l'expert, il est exigé de resemer, chose que nous avons toujours faite avec notre herse rotative. Mais il faut pouvoir le faire ! Quand on resème en fin d'hiver ou au printemps, les conditions ne sont jamais très bonnes, les sols sont encore humides et nous refaisons des dégâts par-dessus, ce n'est pas la meilleure des choses… Et automatiquement, les sangliers reviennent aussitôt remuer le semis. Le résultat de l'opération ? Zéro ! Et que l'on resème ou non, les mauvaises herbes prennent toujours le dessus, je pense notamment aux chardons. Rappelons que si nous ne resemons pas comme demandé, l’indemnisation ne marche pas ».
Les regains oubliés
Le niveau des indemnisations est toujours sous-évalué dans les prairies observe le Côte-d'orien : « si cela est toujours le cas aujourd'hui, le taux de pertes considéré par la Fédération des chasseurs est limité à 5 t/ha de fourrages. Certaines années, nous sommes en capacité de récolter davantage et tout ce que nous aurions pu avoir en regains n'est pas comptabilisé. Même dans les cas où le semis repart bien, une prairie met du temps à se régénérer : cela n'est pas pris en compte dans les indemnisations. La réglementation est paraît-il plus souple aujourd'hui mais avant, il ne fallait surtout pas surestimer ses dégâts, sous peine d'être pénalisé par l'expert… Cela ajoutait de la complexité à cette gestion de dégâts de sangliers ». L'éleveur retraité cite également la casse de matériels : « il y en a souvent, dans les prairies. Les dents de la faneuse, c'est un grand classique. Nous y avons même laissé une roue, un jour… Un jour, mon frère et moi, nous nous sommes même posé la question s'il fallait continuer ou non de récolter les fourrages dans les prés qui posent le plus de problèmes, souvent situés à la limite d'un bois. Je suis aujourd'hui retraité et tout cela est derrière moi. C'est sûr, ce n'était pas mon travail préféré ! ».
On croise les doigts
Michel Boulmier nous l'a précisé d'emblée : les dégâts à la date du 28 février sont les plus faibles jamais enregistrés depuis ces dix dernières années : « cela n'inverse pas la tendance de la dernière décennie, et il ne faut jamais crier victoire trop vite. Mais c'est vrai, c'est plutôt très calme depuis plusieurs mois, il faut le reconnaître. Je ne sais pas si cela est lié aux nombreux glands tombés à l'automne et/ou à la forte humidité qui inciteraient les sangliers à rester dans la forêt ».