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Conséquences de la FCO

« Elle dévore tout »

Depuis novembre dernier, Florent Joly (Lormes) subit les conséquences de la FCO.

Par Chloé Monget
« Elle dévore tout »
Florent Joly (Lormes) au sein de son cheptel de Charolais et Limousin.

« J'ai cru que ça allait passer mais ça ne s'est pas arrêté » détaille Florent Joly, exploitant à Lormes et faisant face depuis la fin 2024 aux conséquences de la FCO dans son cheptel (Charolais et Limousin).

Avec 50 vêlages encore à faire, sur 130 prévus environ, il revient sur les premières problématiques : « En septembre, une vache Limousine n'allait pas bien. J'ai fait intervenir les vétérinaires, mais malgré les traitements, elle est morte. Avec du recul, elle avait beaucoup de symptômes de la FCO : croûte au nez, langue gonflée, etc. Mais, sur le coup, je me suis dit que cela était une exception. Puis, en novembre, les premiers avortements au pré ont eu lieu… Ensuite, les vêlages ont démarré. Et là, ce fut le coup de massue ». Il déplore alors : « À l'accoutumée je surveille tout via caméra car j'habite à quelques kilomètres de l'exploitation. Mais, cette année, je devais être présent jour et nuit pour m'occuper des animaux, afin de sauver les veaux en bon état ».

Pour les vêlages, il détaille : « Certains veaux sont nés avec des déficiences neurologiques et se jetaient dans tous les sens. D'autres sont nés aveugles… le dernier en date et encore sous la mère après 3 semaines car je n'ai pas d'autre veau pour le remplacer et je ne veux pas que la mère se tarisse. Quand on voit ses veaux ainsi, on a vraiment mal au cœur… ». Outre les aveugles et les morts, Florent Joly pense qu'il y a d'autres phénomènes anormaux dus à la FCO : « Par exemple, j'ai un Limousin né presque sans poil sur le museau. D'autres encore sont peu énergiques… En parallèle, bon nombre de mes veaux ont eu la septicémie et, malgré toutes les vaccinations contre les diarrhées sur les vaches, certains ont tout de même nécessité des perfusions… Aujourd'hui, j'ai 80 veaux, nous avons réalisé des prises de sang sur certains, et tous sont positifs FCO(3). Je vois bien qu'ils ne profitent pas comme ceux des autres années… Alors je me demande : qu'est-ce qu'ils vont devenir ? Quelles seront les conséquences sur leur croissance et donc sur les retombées pour l'exploitation ? ». Même s'il n'a pas réponse à ces deux premières interrogations, ses questions continuent de s'empiler…


Questions et demandes

Forent Joly s'interroge : « Est-ce que je dois vacciner ? Quels sont les risques de la vaccination à long terme ? Comment se prémunir contre cette maladie ? Pourquoi je suis touché ? Quelles sont les conduites qui sont plus propices au développement de la maladie ? On ne sait rien, on est complètement perdu. Même nos vétos hésitent sur les préconisations ! C'est comme si personne n'avait d'information ». Face à cela, lui et sa compagne, Julia Rousseau (ne travaillant pas dans l'exploitation), stipulent : « l'État aurait un rôle à jouer pour financer des études, afin de pouvoir avoir des débuts de réponses à une partie de ces questionnements ». En sus, ils évoquent également : « on devrait aussi avoir un soutien financier, car certaines exploitations ne pourront pas se relever de toutes les pertes ». Pour l'indemnisation, ils développent : « pour nous, c'est sur le prix du produit fini qu'elles devraient être indexées et pas sur le prix des veaux. En plus, les frais vétérinaires engendrés par la FCO devraient être pris en compte, car clairement cela représente une sacrée facture. Et tout cela est sans compter l'achat de veaux pour remettre sous les mères ».

Sans barrières

Si la maladie vectorielle a des conséquences indéniables sur les cheptels, d'autres sont également à déplorer. En effet, Florent Joly évoque les heures à rallonge engendrées par la situation : « Je veux sauver mes veaux, donc je ne regarde plus la montre… mais, c'est du temps que je ne passe pas avec ma famille ». Julia Rousseau rebondit : « Une exploitation prend déjà beaucoup de place dans les discussions familiales. Mais là, elle dévore tout ». Si « prendre son mal en patience » semble être la ligne de conduite de la famille de Florent Joly, il n'en reste pas moins que cette situation pèse sur l'ensemble des parties. Florent Joly développe : « j'ai conscience qu'il faudra faire une pause, mais je ne peux pas me le permettre pour le moment et c'est un grand regret car je rate des moments précieux avec mes enfants ». Florent Joly conclut : « j'ai encore 50 vêlages à faire… j'ai peur pour la suite. Cela fait 10 ans que je suis installé, je n'ai jamais vu une telle hécatombe ; c'est démoralisant. On fait cette profession par passion, mais là j'y vais à contrecœur car tous les jours il y a un problème à supporter ». La FCO a donc des retentissements dans les exploitations et ronge tout ce qui les entoure au passage.

Quelle voie ?

Florent Joly s'interroge sur la suite à donner. « Je pensais réduire le nombre de vêlages et augmenter la culture de céréales sur mes terres labourables. Mais, quand on voit les problématiques que les collègues céréaliers ont également, on se demande quel est le meilleur choix. Finalement, je pense qu'il n'y en a aucun au vu des dernières années entre les sécheresses, les canicules, les trop pleins d'eau, les maladies vectorielles ou l'envolée du parasitisme… ». Dépité par la situation, il poursuit : « Certaines exploitations peuvent survivre à quelques coups durs, mais si elles peuvent respirer financièrement à un moment donné. Aujourd'hui, on étouffe. Finalement, on se demande si cela vaut le coup de continuer ».

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