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FDSEA

Comment fonctionne le label bas carbone grandes cultures ?

Le 11 janvier, la section végétale de la FDSEA s'est réunie, à Auxerre. À cette occasion, Nathalie Gosselet, responsable des études économiques et environnementales à la FOP (fédération française des producteurs d'oléagineux et de protéagineux) était présente pour aborder la thématique du label bas carbone grandes cultures, son fonctionnement et ses opportunités pour les exploitations céréalières. Cette dernière a pris le temps de répondre à nos questions sur ce sujet. 

Par Christopher Levé
Comment fonctionne le label bas carbone grandes cultures ?
Nathalie Gosselet, responsable des études économiques et environnementales à la FOP, a abordé la thématique du label bas carbone grandes cultures, son fonctionnement et ses opportunités pour les exploitations céréalières, lors du CA de la section végétale de la FDSEA.

Quel était le but de cette intervention lors du CA de la section végétale de la FDSEA de l’Yonne ?
Nathalie Gosselet : « Le but de cette intervention était d’expliquer aux agriculteurs ce qu’il se passe actuellement sur le bas carbone et de leur présenter les éventuelles opportunités qu’il y a pour les exploitations de grandes cultures. C’était aussi de montrer que l’on est présent sur une démarche qui est en train de se construire et dont on ne mesure pas encore réellement l’importance que cela pourrait, ou pas, avoir en termes financiers pour les exploitations. L’objectif est de ne surtout pas vendre du rêve mais de présenter quelque chose de factuel pour commencer à y réfléchir ».

Dans les choses qui peuvent être faites, comment cela se définit ?
NG : « On a une initiative, portée par la France, qui est d’établir un label bas carbone. Le label bas carbone est un cadre de certification qui est franco-français et encadré par le MTES (ministère de la transition écologique et solidaire). Il est à plusieurs niveaux. Il y a le ministère qui fixe un référentiel national, qui est déjà fait et qui approuve ensuite des méthodes sectorielles ayant été élaborées par les différentes parties prenantes et les différents secteurs. C’est dans ce cadre-là que les grandes cultures ont élaboré une méthode sectorielle dite la méthode grandes cultures. Cette méthode a été approuvée par le MTES. On en est là aujourd’hui. Maintenant, elle doit donner lieu à des projets locaux qui seront à l’initiative des interlocuteurs territoriaux et qui devront, pour chacun d’entre eux, être labellisés par les préfets de région. Ces projets donneront lieu à des réductions d’émissions ou du stockage carbone, qui se traduiront en crédits carbone, qui eux seront échangés sur des marchés de gré à gré et qui amèneront une rémunération que l’on espère intéressante pour les agriculteurs. On a maintenant la volonté de faire reconnaître le label bas carbone grandes cultures au niveau européen. La commission européenne a fait part d’une communication sur ce sujet qui s’appelle carbone farming, en décembre. Il va y avoir une conférence européenne sur ce point à la fin du mois de janvier, avec la mise en place d’un groupe d’experts. Il serait important pour nous que la France joue son rôle et fasse valoir l’avance qu’elle a pu prendre dans ce domaine ».

Concrètement, par quels types de projet cela pourrait-il se traduire ?
NG : « En grandes cultures, on n’a pour le moment pas de projet qui a émergé. La méthode met en avant des leviers qui permettent de générer un crédit carbone. On en a sur différents points : sur l’introduction ou l’expansion de couverts végétaux, sur l’apport et la nature de fertilisants, ou encore sur l’introduction de légumineuses dans la rotation. Ce dernier est un levier qui nous est cher dans la filière puisque les légumineuses fixant l’azote, leur introduction dans une rotation de grandes cultures permet de réduire les émissions et doit donc pouvoir donner lieu à l’attribution de crédits carbone ».

Comment sont définis ces crédits carbone et qu’est-ce que cela va apporter derrière à l’agriculteur ?
NG : « Au stade actuel, on a une méthodologie qui nous permet de calculer des réductions d’émissions. Ce qui est important, c’est que cette méthodologie est scientifiquement très sûre puisqu’elle est approuvée par le MTES. Au niveau du label bas carbone, les deux volets importants que l’on regarde sont à la fois la réduction des émissions de GES et le stockage de carbone dans les exploitations. On espère que ce label bas carbone va générer un plus au niveau des exploitations agricoles car c’est quelque chose qui pourra accompagner une transition vers des pratiques vertueuses, accompagner une démarche déjà entreprise par un agriculteur, ou le conforter dans une démarche qu’il souhaite mettre en place ».

« L'objectif est de valoriser les crédits carbone »

Présent également lors de ce CA, Gilles Robillard, vice-président de la FDSEA de l’Yonne, président de Terres Inovia et membre de la FOP, est revenu sur les objectifs du label bas carbone grandes cultures. « Il y a eu une loi sur la transition énergétique qui a été votée en 2017 avec l’objectif d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Demain, les grandes entreprises émettrices de gaz à effet de serre seront taxées si elles ne concourent pas à cet objectif. Deux solutions s’offrent à elles : soit elles payent cette taxe, soit elles décident de compenser leurs émissions de carbone en rémunérant les pratiques qui permettent de le capter.
Le secteur agricole, on le sait, peut être source de captation de carbone. En effet, le seul processus permettant de capter du carbone dans l’air, c’est la photosynthèse. Ensuite, la question est de savoir, comment nous, dans le secteur agricole, nous pouvons capitaliser là-dessus et en faire une valeur ajoutée pour les agriculteurs. Pour le valoriser, il faut avant tout être capable de mesurer le carbone qui peut potentiellement être stocké. Dans une trajectoire de neutralité carbone, l’enjeu est de savoir si, grâce à leurs efforts, les agriculteurs seront capables de stocker encore plus de carbone. Si on y arrive, il faudra déterminer comment valoriser les crédits carbone générés par l’amélioration des pratiques agricoles ».