« Ce n'est pas parce qu'on va bien qu'on ne peut pas aller mieux »
La formation « Bien dans ses bottes », organisée par la FDSEA de l'Yonne, s'est terminée le 22 janvier, au terme de trois sessions de deux jours. Derrière cette formation, où 11 agriculteurs icaunais ont participé, l'objectif était de prendre du temps pour soi pour libérer la parole et se replacer au centre de ses propres décisions. L'un des stagiaires de la formation a accepté de raconter son expérience, lui, qui aujourd'hui, assure « se sentir mieux ».

« Est-ce que je suis prêt, ou non ? ». C'est la question que s'est posée Olivier*, à l'issue de la soirée de présentation de la formation « Bien dans ses bottes » (mise en place par la FDSEA de l'Yonne), qui a eu lieu quelques mois avant son lancement. S'il confie ne pas avoir eu la réponse le soir même, il avait l'intime conviction que suivre cette formation lui était nécessaire. « J'avais besoin que des choses sortent, de les partager, de les comprendre. Je savais que j'allais me livrer et en me livrant, je me suis dit que j'allais peut-être découvrir des choses sur moi-même ».
Olivier est éleveur dans le département. Lorsque la formation est lancée le 20 novembre 2024, il se retrouve avec 10 autres agriculteurs icaunais, aux profils, parcours, histoires, productions et problématiques différents. Lui, c'est un contexte compliqué, mêlant vie professionnelle et familiale, qui le pousse à s'inscrire. « Cette formation est arrivée au bon moment pour moi car on fonçait droit vers le point de rupture. En faisant cette formation, je me disais que peut-être j'aurais des clés pour m'aider à faire face à mes problèmes. Je savais que tout ne serait pas résolu, mais je souhaitais au moins repartir avec quelques éléments ».
Parce que derrière cela, la volonté d'Olivier était claire : que le travail en famille se poursuive et que la ferme puisse se pérenniser dans le temps. « Je voulais mettre toutes les chances de mon côté avant d'avoir un échange profond avec les personnes concernées ».
La notion de groupe
Pour Olivier, la notion de groupe a beaucoup compté dans cette expérience. « Le sentiment que j'ai eu, c'est qu'on était tout au même niveau. Je ne connaissais pas grand monde donc j'avais forcément une certaine appréhension en arrivant. Je me suis retrouvé dans un groupe de douze personnes, tous avec un vécu, une vision des choses différentes, ce qui fait la richesse de la formation », confie-t-il. « Dans les moments compliqués, il y avait une interaction entre nous. On ne se contentait pas de nous écouter, on échangeait, on partageait nos expériences, sans aucun jugement. Je ne m'étais jamais retrouvé dans un tel contexte, mais j'étais à l'aise. En fait, chacun a su trouver sa place. Et au cours de la formation, j'ai vu évoluer toutes ces personnes. Ça aussi, c'était plaisant. J'espère avoir l'occasion de les revoir, le groupe m'a fait du bien. Je me suis senti en confiance avec eux, alors qu'on se retrouve à nu quand on vide son sac, ce qui n'est pas facile car cela fait remonter des choses douloureuses ».
Et s'il y a bien un terme sur lequel veut insister Olivier, c'est celui de bienveillance. « Cela était différent du climat dans lequel le monde agricole se trouve encore un peu, où il n'y a pas de place pour les faibles, où il faut être fort, ne pas se laisser faire, ne pas pleurer. Alors que tout le monde pleure et ce n'est pas grave. On a le droit d'avoir des moments de fragilité. De toute façon, même en l'enfouissant, à un moment donné cette fragilité surgira. On n'est pas des machines, on est des êtres humains ».
Apprendre sur soi-même
Durant cette formation, Olivier a aussi beaucoup appris sur lui-même. « Je suis quelqu'un qui n'a pas confiance en lui. Dans ce cas, on pense que le problème, c'est soi-même. Ce que j'ai découvert, c'est que la solution, c'était également moi-même ». Il poursuit. « Il est important de mettre des mots sur ses émotions, identifier ses valeurs et se rappeler qui on est. Tout cela, on le voit durant la formation. Cela permet de mieux se comprendre soi-même et de mieux comprendre des situations ».
Aujourd'hui, Olivier affirme se sentir « beaucoup mieux. J'aborde les choses totalement différemment. Mes problèmes ne sont pas réglés mais je les vois sous un autre angle, avec des clés pour les résoudre ».
Il en est même sorti avec une résolution : « Prendre du temps pour moi, ne pas avoir peur de me faire plaisir. Je pense que chaque personne qui a suivi la formation est repartie mieux qu'elle était arrivée, c'est une certitude, avec de réelles ambitions, de réelles motivations, des clés pour résoudre les problèmes. Cette formation, c'était un moment pour moi. Je ne pensais pas dire ça un jour », rit-il, « mais après tout, il n'y a aucun mal à prendre du temps pour soi, qui nous fait du bien ».
Mais Olivier tient à souligner que cette formation n'est pas uniquement pour ceux qui sont dans une situation complexe. « Il y a une formule que je retiens, que j'ai entendu durant cette formation, qui est : « ce n'est pas parce qu'on va bien, qu'on ne peut pas aller mieux » ».
Il ajoute : « À ceux qui hésitent à s'inscrire, je leur dirais de foncer. La faire, c'est se prendre en main pendant qu'il est encore temps de pouvoir le faire. Il ne faut pas avoir peur de prendre les devants face à une souffrance, quelle qu'elle soit. Je pense d'ailleurs que ce genre de formation devrait être obligatoire pour tous les agriculteurs, lors de constitution de société par exemple, ne serait-ce que pour « préparer le terrain », afin d'éviter certains écueils. Cela ne peut être que bénéfique à la fois pour l'entreprise que pour les humains qui y travaillent, pour fluidifier les rapports ».
Grâce à la formation « Bien dans ses bottes », Olivier y voit beaucoup plus clair. De quoi appréhender l'avenir avec un œil neuf et de trouver une issue positive à ses problématiques.
*Afin de préserver l'anonymat de notre interlocuteur, nous avons choisi de lui attribuer un prénom fictif.
Formation « développer mon asservitée »

Dans la continuité de la formation « Bien dans ses bottes », la FDSEA propose un nouveau programme axé sur le développement de l’assertivité et des compétences relationnelles. Cette nouvelle formation, qui aura lieu les 10 et 11 mars, s’adresse à tous les agriculteurs, ayant suivi ou non la formation « Bien dans ses bottes », et se déroule sur 2 jours (14 heures). L’objectif est d’identifier des outils efficaces pour continuer d’apprendre à se connaître et ainsi pouvoir analyser plus rapidement les conflits et en comprendre les origines et les causes pour élaborer des stratégies de résolution.