Écopâturage dans les vignes
Le domaine de la Croix Montjoie opte pour les moutons

Christopher Levé
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Au domaine de la Croix Montjoie, c'est la deuxième année que des moutons sont installés dans les vignes. Ceci dans le but premier de maîtriser l'enherbement l'hiver, ce qui permet de supprimer un labour au printemps, dans une logique de réduire l'empreinte carbone du domaine.

Moutons
Au domaine de la Croix Montjoie, le choix a été fait d'introduire des moutons dans les vignes pour la gestion de l'enherbement.

Matthieu Woillez et sa compagne Sophie, gérants du domaine de la Croix Montjoie, à Tharoiseau, l'idée d'introduire des moutons dans leurs vignes n'est pas récente. « On y pense depuis 4 ou 5 ans, même si la réalisation est plus récente puisqu'on a commencé à l'hiver 2023-2024 », débute Matthieu Woillez. « Ce n'est pas quelque chose qu'on a inventé, cela existe et se pratique dans d'autres domaines de l'Yonne et dans d'autres régions, notamment dans le sud de la France ».
La raison première de cette pratique réside dans la volonté de réduire l'empreinte carbone du domaine. « Chaque opération que l'on fait avec du matériel viticole, comme un enjambeur, consomme du carburant. On essaye alors de limiter cela du mieux possible. Le fait de mettre un troupeau de moutons l'hiver dans les vignes va permettre de supprimer un labour au printemps. Car étant en bio, le seul moyen à notre disposition pour maîtriser l'enherbement est le labour. Et un labour de gagné, c'est quelques centaines de litres de carburant en moins de consommés, ce qui est intéressant pour l'empreinte carbone ».
La seconde raison est la volonté de ramener de l'animal dans les vignes. « Le fait de ramener une vie animale dans les vignes est, selon nous, intéressant pour la vie des sols ». Cela permet effectivement d'apporter un peu de matière organique supplémentaire à la terre.

Une solution en interne

C'est donc à l'hiver 2023-2024 que les moutons ont fait leur apparition dans les vignes du domaine. « On a commencé à travailler avec un éleveur du coin, basé en Côte-d'Or, qui a un troupeau uniquement destiné au pâturage, travaillant pour des entreprises, des collectivités. Cela s'est très bien passé, on était content des résultats sur les parcelles, la pression herbe avait diminué », sourit Matthieu Woillez.
Alors que le couple de viticulteurs avait dans l'idée de poursuivre la collaboration, l'année 2024, très compliquée économiquement parlant avec une perte quasi totale de la récolte, a remis le partenariat en question. « On a malheureusement dû faire des coupes budgétaires pour la pérennité du domaine », confie Matthieu Woillez.
Cependant, le domaine souhaitait poursuivre avec ce système. C'est alors en interne qu'une solution s'est trouvée. « Au domaine, on avait déjà un petit troupeau de moutons (des Rackas, une race hongroise, ndlr) qui entretenaient les prés du domaine. On s'est donc dit qu'on allait essayer de les mettre dans les vignes. Cédric (Denuit, le chef d'équipe du domaine) s'est mis en tête de les rapprivoiser. Il leur a apporté un seau de grains tous les matins. Petit à petit, il a réussi à rapprivoiser une partie du troupeau, les femelles, les mâles étant plus craintifs ».

Un an de préparation

Et depuis la mi-novembre, les moutons sont dans les vignes. Il y a toutefois fallu investir un petit peu dans l'achat de clôtures pour les accueillir dans les vignes. « Il y en a 14 », précise Cédric Denuit. « Il m'a fallu un an pour réussir à les apprivoiser. En arrivant le matin, c'est le premier boulot que je fais de ma journée. Je viens voir si elles vont bien, si elles ne sont pas malades, si elles ne se sont pas sauvées. C'est un travail d'éleveur en parallèle de mon travail de viticulteur », rit-il.
Des moutons qui resteront dans les vignes (ils tournent sur les 13 ha situés sur la commune de Tharoiseau) jusqu'en mars. « On les sortira des parcelles avant que la végétation débute, pour qu'ils ne mangent pas ni cassent les bourgeons », continue Cédric Denuit.
Si l'essai est concluant cette année, le domaine envisage à l'avenir de faire grossir le troupeau, avec quelques naissances. Ce qui permettrait une gestion encore meilleure de l'enherbement. Et de nouveaux petits « collègues » pour Cédric Denuit et son équipe.