Le jeudi 25 janvier, ils étaient plus de 200 tracteurs et au moins 500 agriculteurs icaunais à s’être réunis pour exprimer leur ras-le-bol. Les autoroutes A6 et A19 ont été bloquées pendant deux jours, à l’initiative de la FDSEA de l’Yonne et des JA 89, en attendant les annonces du Premier Ministre Gabriel Attal. Celles-ci ont été entendues, mais n’ont pas convaincu. C’est alors vers la capitale que les agriculteurs ont décidé de poursuivre le mouvement en espérant avoir, cette fois-ci, du concret de la part du gouvernement.
« Notre fin sera votre faim », pouvait-on lire sur quelques banderoles déployées sur l’autoroute A6, à hauteur de Nitry, lors du premier jour du mouvement, mis en place par la FDSEA de l’Yonne et les JA 89.
Si la colère du monde agricole dure depuis des mois, c’est le jeudi 25 janvier que les agriculteurs icaunais ont décidé de dire stop. Une mobilisation de grande ampleur s’est alors mise en place, à l’image de ce que l’on a pu voir sur la quasi-totalité du territoire français. Plus de 200 tracteurs et au moins 500 agriculteurs étaient réunis dans l’Yonne. Les autoroutes A6 et A19 ont été bloquées, respectivement au niveau de Nitry et Villeroy.
« On est resté statique sur les deux points, ce qui a surchargé les réseaux secondaires. L’objectif était de mettre une pression assez forte sur le gouvernement. 85 % des départements étaient en opération syndicale (FDSEA et JA) à ce moment-là », confie Damien Brayotel, président de la FDSEA de l’Yonne.
Au total, ce sont plusieurs milliers d’agriculteurs qui se sont mobilisés dans tout l’hexagone, ces deux dernières semaines. « Le nombre de manifestants est quand même impressionnant et correspond au niveau de ras-le-bol des agriculteurs », assure Damien Brayotel.
« Ne lâchez rien »
Dans l’Yonne, Arnaud Rousseau et Arnaud Gaillot, respectivement présidents de la FNSEA et des Jeunes agriculteurs, sont venus apporter leur soutien aux agriculteurs rassemblés à Nitry, le jeudi 25 janvier. « Ne lâchez rien », a même lancé le président des JA. « Nos représentants avaient besoin de voir le soutien des agriculteurs car ce sont eux qui négocient pour nous au niveau national. Les voir venir dans l’Yonne a permis de donner une ampleur nationale à nos actions. Tous les médias nationaux étaient là, on a eu une audience importante. Et surtout, cela a permis à nos présidents nationaux de venir discuter directement avec les agriculteurs, sur le terrain », poursuit Damien Brayotel. « C’est toujours intéressant d’avoir ce dialogue direct entre les agriculteurs et les têtes de réseaux, sans passer par les intermédiaires comme on peut le faire habituellement. Cela permet aux agriculteurs de dire ce qu’ils ont à dire, d’entendre aussi que nos représentants nationaux ne sont pas des gens hors sols, qu’ils sont, eux aussi, agriculteurs et dans la même situation que nous ».
Un changement d’attitude demandé
À travers cette mobilisation, le monde agricole veut des réponses concrètes à leurs problématiques et surtout des actes. « On sait bien que tout ne va pas se régler du jour au lendemain, en claquant des doigts. Ce que l’on attend surtout, c’est un changement d’attitude. L’agriculture française doit être simplifiée et cela passe par la suppression de beaucoup trop de normes qui la régissent, qui la verrouillent. On veut qu’on nous laisse respirer car aujourd’hui, tout cela est insupportable ».
Si le blocage de l’A6 a duré jusqu’à samedi, les agriculteurs postés à Villeroy ont décidé de lever le camp le vendredi, à la mi-journée, pour rejoindre la sous-préfecture de Sens, où les représentants de la FDSEA de l’Yonne et des JA 89 ont été reçus par le sous-préfet, Wassim Kamel.
« Aujourd’hui on est à un endroit, demain on le sera à un autre et on reviendra peut-être la semaine prochaine ailleurs », promettait Damien Brayotel au départ de Villeroy. Promesse tenue puisque les annonces du Premier Ministre Gabriel Attal, survenues vendredi soir dernier, n’ont pas convaincu les agriculteurs. Ce mardi 30 janvier, ils ont alors décidé de prendre la route direction Paris, afin de bloquer l’A5, à hauteur d’Ourdy, où 50 tracteurs et 100 agriculteurs de l’Yonne (rejoints par des convois similaires provenant de l’Aube et de la Haute-Saône) ont annoncé rester (à l’heure où nous écrivons ces lignes), jusqu’à jeudi.
Respecté car respectable
Si cette mobilisation marque les esprits en France, c’est aussi car elle peut compter sur le soutien de la population. Selon les sondages, près de 90 % des Français soutiennent le mouvement. Mais cela n’est pas dû au hasard. Lors de l’une de ses interviews télévisée, Jérôme Bayle, agriculteur en Haute-Garonne, à l’origine de la mobilisation, a indiqué : « On a été respecté car on a été respectable ».
Et respectable, ils l’ont été et le sont encore, nos agriculteurs. Propre dans leurs actions comme dans leur façon de produire, c’est à cela que l’on reconnaît la qualité de l’agriculture française et des hommes qui la font. « On tient absolument à conserver ce soutien par des actions qui soient respectueuses et sans dégradations. Quand on a 90 % de la population qui nous soutient, c’est un poids énorme pour négocier vis-à-vis du gouvernement. Si on perd ce soutien, on ne représente plus que 3 % de la population. Entre 3 % et 90 %, cela n’a pas le même impact », prévient Damien Brayotel.
Mais le soutien des citoyens est une chose, l’acte en est une autre. « Le citoyen c’est aussi le consommateur. C’est à lui, par ses actes d’achat, de privilégier une alimentation française, qui est saine et de qualité », souhaite le président de la FDSEA de l’Yonne.
La CGB soutien le mouvement
Dans un communiqué, la CGB (confédération générale des planteurs de betteraves), appelle les agriculteurs « à poursuivre la mobilisation, engagée la semaine dernière, aux côtés de la FNSEA et des JA et à se joindre aux actions prévues dans les territoires, en particulier le blocage des accès à Paris ». Les planteurs de betteraves soulignent notamment la nécessité et l’urgence de restaurer les moyens de production, de stopper les importations massives de sucre ukrainien et de mettre un stop à la concurrence déloyale. « La CGB appelle à une révision d’urgence de la politique commerciale de l’UE et à la mise en place de véritables mesures miroirs permettant aux consommateurs européens d’avoir la garantie que les produits qu’ils achètent sont conformes aux normes en vigueur chez nous », est-il écrit.