Journées de la Lucine
Transition énergétique : quel impact pour l'agriculture ?
Les conférences Horsch du 10 septembre à la ferme de la Lucine, en Haute-Marne, ont abordé les dépendances énergétiques et la transition écologique. Tout l’enjeu pour l’agriculture sera de s’adapter sans impacter sa capacité de production.
Des essais sur la neutralité carbone ont été menés sur la ferme expérimentale du pôle d’innovation bas-carbone Terrasolis de Bétheny, près de Reims, dans la Marne. Les résultats démontrent que 40 % des gaz à effet de serre (GES) émis pour produire du blé proviennent de l’engrais minéral. « Pour réduire notre empreinte carbone, il faut réduire notre dépendance à l’azote », résumait Maximin Charpentier, président de Terrasolis, qui intervenait dans le cadre des Journées de la Lucine, organisées par Horsch début septembre en Haute-Marne. Les essais dévoilent également que pour atteindre la neutralité carbone, l’agriculture doit diminuer de 75 % son empreinte carbone et en parallèle produire 25 % de biomasse supplémentaire. Concrètement, sur un hectare de blé, cela revient à passer de 1 800 à 460 kg équivalents CO2 pour l’engrais, de 300 à 80 kg eq CO2 pour les engins agricoles, et de 15,6 à 19 t eq CO2 pour la production de biomasse. Réduire les émissions de GES tout en produisant davantage est l’équation à résoudre pour atteindre cette « compétitivité environnementale ». Pour augmenter la production de biomasse, Terrasolis mise sur une couverture permanente du sol. « Plus un sol est vivant, plus il a de matière organique et à chaque fois que le taux augmente de 0,5 la photosynthèse s’améliore de 8 %. La matière organique de nos sols est donc incontournable », soulignait Maximin Charpentier.
Économie territorialisée
« L’agriculture est un bilan énergétique et l’énergie vaut beaucoup d’argent, c’est un sujet d’avenir. Il ne faut pas se faire voler cette valeur ajoutée, ne pas passer à côté de cette opportunité », déclarait l’agriculteur marnais. C’est pour ramener cette valeur aux territoires que Terrasolis a monté le projet Cyclorganic, un démonstrateur de bioéconomie territoriale reposant sur la production agricole bas-carbone, la transformation de biomasse et les usages. Mené sur le territoire pilote du Grand Reims, le projet couple petite méthanisation à la ferme et transport du biogaz jusqu’à une bioraffinerie en charge de son épuration et sa valorisation. Cette bioraffinerie utilisera la plasmalyse, une technologie capable de dissocier dans le méthane, d’une part l’hydrogène et de l’autre le carbone, sous forme de poudre. Cette dernière est intégrée au digestat pour retourner dans les sols et ainsi renforcer leur taux de matière organique. « L’idée est de boucler les cycles. L’hydrogène peut servir à produire de l’azote minéral et le méthane peut être utilisé pour des véhicules agricoles ou autres », indiquait Maximin Charpentier en précisant qu’un méthaniseur de 50 nm³ produit quotidiennement 200 kg d’hydrogène et 600 kg de carbone. La méthanisation doit être adaptée à chaque territoire. « L’économie territorialisée doit prendre en compte le gisement que je suis capable de faire et les usages possibles pour valoriser mon énergie. C’est à chaque territoire de trouver sa solution », précise Maximin Charpentier. Le Grand Est représente 40 % de la méthanisation en France et la planification écologique prévoit de multiplier par dix le nombre de méthaniseurs dans le pays. « L’agriculture représente un vrai potentiel, les agriculteurs ont de l’or entre les mains. Nous sommes capables de nourrir tout en ayant une compétitivité très puissante », concluait le président de Terrasolis.