Céréales
L'exigence payante des orges brassicoles
Dans le cadre de sa conférence annuelle des marchés, Dijon Céréales proposait une table ronde consacrée à l'intérêt des orges brassicoles. Des cultures contraignantes mais dont le niveau de valorisation est à prendre en compte, surtout au sortir d'une année telle que 2024.
1 milliard de pintes de bière : voilà ce que l'on peut produire à partir des 108 000 t d'orges brassicoles collectées annuellement par Dijon Céréales. Pour la coopérative, ce marché est devenu incontournable pour plusieurs raisons : la filière brassicole en France est très performante, reconnue, et sa production d'orges fait référence. Par ailleurs « il y a une prime sur les orges brassicoles, par rapport aux orges fourragères, qui est vraiment très importante. Il serait dommage de passer à côté » spécifiait Sophie Tard, commerciale au sein de la filiale Cérévia de Dijon Céréales pour la commercialisation des grains qui participait, le 12 novembre, à une table ronde sur ce thème. Par ailleurs, Benjamin Boyet, nouveau directeur du pôle agricole de la coopérative, également présent, précisait que « Dijon Céréales souhaite, à l'avenir, faire augmenter la part prise par l'orge brassicole. On croit dans cette filière qui est rémunératrice, d'autant plus que la filière brassicole est aussi porteuse de forts enjeux en matière de décarbonation. » Reste que la production d'orge brassicole réclame de se conformer à un cahier des charges très exigeant. Sophie Tard en rappelait les principaux critères :
- pureté variétale dans les lots livrés, taux d'humidité, calibrage, absence de grains de tournesol, propreté des orges (GH) et contamination par l'ergot : ces trois derniers critères font l'objet des plus grandes attentions des malteurs aujourd'hui.
- critères sanitaires : absence d'insectes, de mycotoxines et de métaux lourds.
- critères technologiques : 95 % minimum de germination (la malterie reposant sur la germination de l'orge qui libère de l'amidon et des enzymes utiles aux brasseurs), taux de protéines compris entre 9,5 et 11,5.
Un processus complexe
Gaëtan Mugard, responsable production et qualité au sein de la brasserie de Vauclair, située en Haute-Marne et dont le produit phare est la bière La Choue, confirmait ces attentes de l'aval de la filière brassicole. On est confronté là à des attentes en cascade : « le brasseur est exigeant vis-à-vis du malteur, qui est exigeant vis-à-vis de l’organisme stockeur, soulignait Gaëtan Mugard. Dans les bières, on utilise toujours une base de malt d'orge, c'est pourquoi la filière est si importante. Notre priorité, c'est d'avoir une qualité de bière identique, du 1er janvier au 31 décembre. Nous produisons avec un malt 100 % français. » Les adhérents de Dijon Céréales ont pu, grâce à ce professionnel, prendre connaissance du processus complexe qui mène à l'exploitation du malt pour fabriquer la bière. Une complexité où se mêlent levures, fermentations, chauffage des jus, stabilisation du produit sur une période de garde de 21 jours… « Pour nous, poursuivait-il, les enjeux tournent autour de la qualité du stockage des grains, avec une grosse vigilance à avoir sur les taux d'humidité et sur l'homogénéité des lots. Le taux de protéines est aussi important car il conditionne la tenue de la mousse de la bière. » Il faut aussi veiller au calibrage : plus le grain sera gros, plus il contiendra d'amidon et plus le rendement sera important pour le brasseur. L'orge brassicole la plus utilisée est l'orge de printemps (75 % contre 25 % d'orge d'hiver). L'orge de printemps assure un meilleur rendement au brassage, il est aussi plus facile à malter. Néanmoins, l'orge d'hiver a des atouts à faire valoir : elle produit plus d'enzymes et donc plus de sucres fermentescibles. « Par ailleurs, précisait Gaëtan Mugard, le travail effectué depuis plusieurs années en termes de sélection variétale permet l'émergence de variétés d'hiver qui sont au niveau des orges de printemps que l'on pouvait avoir il y a quelques années. »
Potentiel prometteur
Sur ces orges, le potentiel de développement apparaît donc prometteur. Reste à bien sensibiliser les agriculteurs sur les précautions à prendre pour fournir des orges brassicoles répondant aux attentes de la filière : Dijon Céréales communique beaucoup sur l'importance du nettoyage des machines avant récolte pour des lots homogènes et propres. La coopérative investit aussi dans l'outil numérique Inarix qui permet, à partir d'une photo prise sur un smartphone, de reconnaître les variétés. Enfin elle améliore ses processus de stockage de manière constante.
L'orge brassicole, un secteur prometteur pour Dijon Céréales
180 000 t d'orges sont produites au niveau de Dijon Céréales dont 60 % d'orges brassicoles et 40 % d'orges de fourrage. Dans les orges de brasseries, les adhérents de la coopérative produisent 65 % d'orges d'hiver (6 rangs de variétés Faro et Carrousel, cette dernière qui monte en puissance, mais aussi des 2 rangs avec la nouvelle variété Comtesse qui est venue remplacer Salamandre), et 35 % d'orges de printemps (principalement la variété Planet et Sting, qui va remplacer la variété Fantex). D'autres variétés sont appelées, à l'avenir, à compléter ce panel et Dijon Céréales mène, chaque année, des essais sur une trentaine de variétés d'orges brassicoles. La coopérative vend un peu de ses orges brassicoles à l'export de proximité pour alimenter les malteurs allemands, belges, néerlandais, suisses ou espagnols. D'autres marchés plus lointains sont aussi actifs vers la Chine, la Colombie, le Mexique. La malterie française reste le marché principal et prioritaire avec les groupes français Malteurop (Vivescia), Soufflet et Boortmalt (Axéréales) qui consomment annuellement 2 millions de t d'orges. Dijon Céréales livre 8 des 14 malteries que ces groupes possèdent en France, dont 50 000 t annuellement à la malterie de Brazey-en-Plaine (groupe Soufflet), au sud de Dijon.