Élevage caprin
« Sortir de sa bulle »

Chloé Monget
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Entre directive européenne sur le transport des animaux vivants et questionnement sur le devenir de la collecte de chevreaux, Capri'Nièvre, la FDSEA 58 et les JA 58 proposaient une rencontre axée sur l'engraissement de chevreaux le 13 janvier à Garchy.

« Sortir de sa bulle »
La Chèvre'rit d'Amandine (Garchy) accueillait la rencontre de la FDSEA 58 et des JA 58.

Afin d'apporter quelques éclairages d'actualité et une vision sur les leviers à mettre en place, une rencontre ciblée sur l'élevage caprin, et plus particulièrement sur l'engraissement des chevreaux, était organisée par Capri'Nièvre, la FDSEA 58 et les JA 58, le 13 janvier à la Chèvre'rit d'Amandine (Garchy).

Si cet événement intervient dans le fil des rencontres orchestrées par les syndicats dans ce mois de janvier, Stéphane et Amandine Lafranchise, qui accueillaient les participants dans leur exploitation, stipulent : « Cela fait longtemps que nous voulions faire, avec Capri'Nièvre, une telle rencontre. Mais, le quotidien prend parfois trop de place pour s'investir dans d'autres choses et le mois de janvier, où la majeure partie des animaux sont taris, s'y prête plus. Nous sommes donc ravis qu'elle ait finalement lieu car il est aujourd'hui indispensable de sortir de sa bulle ». Ainsi, la réunion prévoyait l'intervention de Jean-Philippe Bonnefoy, exploitant en Saône-et-Loire, président du syndicat caprin de son département et vice-président de la Fédération nationale des éleveurs de chèvres (FNEC). Emmanuel Bernard, président de la FDSEA 58, détaille : « L’orientation syndicale appartient à chacun, l’avenir de la filière, concerne tous les producteurs. De ce fait, il est important de se réunir au travers de spectres européens, nationaux et locaux afin d'envisager le futur via des discussions nourries ».

Les monopoles insoutenables

Après un casse-croûte convivial, les échanges ont débuté pour se concentrer sur la valorisation des chevreaux et le projet de règlement pour le transport des animaux vivants (1). Pour le premier sujet, Amandine Lafranchise réagit : « Durant le confinement, nous vendions le chevreau 1 euro ; un scandale ». Au fil des discussions sur cette problématique, c'est le monopole des trois gros faiseurs de l'engraissement qui fut pointé du doigt comme empêchant toute négociation : « Vous n'avez pas la main, car vous n'avez pas prouvé la plus-value réalisable dans vos fermes pour cette matière première. Or, si les collecteurs prennent vos chevreaux, c'est bien qu'ils rapportent quelque chose… » développe Jean-Philippe Bonnefoy, et nuance : « En l'état, la marge que vous ferez sur la viande ne sera pas mirobolante, mais au moins vous accompagnez votre produit jusqu'au bout. Ensuite, il restera un travail de communication à faire sur la viande de chèvre, car elle est un peu oubliée. Mais, il faut prendre en charge ce volet car personne ne connaît mieux nos produits que nous. À mon sens, le problème final n'est pas le manque de débouchés commerciaux, mais bien le manque de chevreaux gras ». Pour avoir une petite idée du volume, Cyrille Forest prit alors la parole pour la SCIC SA Abattoir du Haut-Val-de-Loire : « Nous passons environ 250 chevreaux / an. Pour mémoire, pendant la période de confinement, les frontières étant fermées, l'abattoir avait totalement rempli son rôle d'outil et de services de proximité pour les éleveurs. S'il y a une véritable volonté des éleveurs de s'impliquer dans l'engraissement, il faut organiser les échanges avec l'abattoir puisqu'il devrait se transformer et donc ouvrir les possibles en matière de débouchés ». Un élément qui réjouit Jean-Philippe Bonnefoy : « Si vous avez des outils d'abattage locaux, vous avez un atout indéniable pour redevenir maître de cette partie de la production » avant de s'assombrir en parlant du second sujet au programme : « Mais, avec le projet de règlement du transport des animaux de l'Union Européenne, cela peut vite se gâter. En effet, si cela passe en l'état, nous ne serons plus en mesure d'approvisionner les abattoirs car dans l'incapacité de bouger nos animaux… Mais nous allons batailler ».

L'élan collectif

Afin de sortir de ces problématiques, une idée majeure surgit des discussions : l'engagement des professionnels. En effet, si leur implication sans borne pour le travail au quotidien dans leurs exploitations fut saluée, il fut rappelé que leur présence était aussi indispensable auprès des différentes instances afin de défendre leur profession. Pour imager le tout, Stéphane Lafranchise martèle : « Il est toujours bien d'avoir des professionnels des filières s'occupant des dossiers, car, pour rappel, il y aura toujours des administratifs pour s'occuper des éleveurs… comme avec la mise en place du nouveau système d'autocontrôle… qui rajoute encore un coût et une belle complexité à nos fonctionnements ». Outre la représentativité des exploitants, c'est également le collectif qui fut mis en exergue, et spécifiquement pour les éleveurs caprins, Jean-Philippe Bonnefoy rappelle : « Vous avez la chance d'avoir un groupe existant qui est Capri'Nièvre, à vous de le rendre plus dynamique. Utilisez collectivement les outils à votre disposition car c'est bien le collectif d'éleveurs qui fera émerger des solutions logiques et valorisantes pour vos exploitations. En somme, allons vers les autres pour pérenniser nos structures ». Sortir de sa bulle n'est donc pas qu'une image, mais ce pas bien réel à faire vers l'extérieur reste, manifestement, complexe à effectuer au vu du nombre d'éleveurs présents à la réunion du 13 janvier. 

1. https://fnec.fr/projet-de-reglement-transport-des-animaux-vivants/