Point de vue
« Une belle moisson de m..... »

AG
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Le président de la commission « productions végétales » de la FDSEA de Côte-d'Or dresse un état des lieux très difficile de la moisson ou plutôt, de l'après-moisson. Et pas seulement sur le plan économique.

« Une belle moisson de m..... »
Clément Babouillard perçoit un mal-être certain chez bon nombre d'agriculteurs.

Le travail a été difficile, retardé, fatigant et finalement, bien peu payé. « Je n'ai jamais connu une campagne aussi compliquée et éprouvante pour au final, ne pas avoir grand-chose au bout. À entendre un certain nombre de collègues, ce constat est partagé, il y a un grand malaise dans nos campagnes », s'inquiète Clément Babouillard, agriculteur à Ampilly-les-Bordes. Le président de la commission « productions végétales » de la FDSEA21 regrette que la plupart des rendements ne soient pas au rendez-vous cette année, dans bon nombre de cantons de Côte-d'Or : « les blés et les orges, que ce soit d'hiver ou de printemps, sont très décevants. Il n'y a bien que les colzas qui sortent leur épingle du jeu et encore, tout le monde n'a pas la chance d'avoir réussi cette culture. Globalement, la qualité n'est pas là non plus, cela n'arrange rien. Nos produits continuent de diminuer, sachant que les cours des matières premières s'effondrent depuis un mois. Pour couronner le tout, nous avons eu droit à plusieurs épisodes de grêle, tout était décidément réuni pour que ça se passe mal. C'est une belle moisson de m… avec ces pluies incessantes et tout le reste ».

Une dérogation exigée

Clément Babouillard, contacté le 6 août, était d'autant plus énervé qu'une dérogation pour les couverts n'était toujours pas d'actualité, le jour de cet échange : « une fois de plus, on nous oblige à semer ces couverts alors que les conditions ne s'y prêtent vraiment pas… Nous n'arrivons même pas à entrer dans certaines parcelles pour semer du colza… C'est n'importe quoi. J'encourage mes collègues à ne pas semer pour ne pas perdre davantage d'argent. Si un contrôleur passe dans le coin, nous serons là pour l'inviter à retourner très vite chez lui. Syndicalement parlant, notre position est claire : nous exigeons une dérogation. Et vite ». Clément Babouillard demande que « l'impact de cette moisson » soit pris en compte par le gouvernement : « un accompagnement économique va s'imposer, il va falloir réfléchir à la forme qu'il pourrait prendre. Il n'est pas question de laisser mourir un secteur de production qui nourrit notre pays, on nous a assez bassinés comme ça avec la souveraineté alimentaire… Aujourd’hui, des Russes font la pluie et le beau temps sur le marché, cela suffit. La France trouve bien un milliard d'euros pour nettoyer la Seine pour les Jeux olympiques, je ne comprendrais pas qu'elle ne trouve rien pour son agriculture. Nous voulons un vrai recadrage, aucun exploitant ne doit rester sur le carreau ». Le responsable syndical n'exclut pas de nouvelles actions : « si rien n'est fait, nous n'en resterons pas là, c'est certain. La colère exprimée lors de nos actions du début d'année est toujours là. Ressortir en manifestations n'est pas à exclure. Si cela se fait, cette fois, ce sera pour paralyser le pays. Si c'est la seule façon de nous faire entendre et comprendre, il faudra passer par là ».