Orges d'hiver
Une année 2024 compliquée

Diane Chavassieux et Léa Bounhoure, Arvalis BFC
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Arvalis Bourgogne-Franche-Comté livre les premiers constats concernant la campagne 2024 sur les orges d'hiver.

Une année 2024 compliquée
Vue sur la plateforme Soufflet de Touillon (nord-ouest de la Côte-d'Or) à la fin du mois de mai.

En 2023 – 2024, le cumul des surfaces implantées en orges d’hiver en Bourgogne-Franche-Comté (BFC) s’établit à 157 600 ha (source : Agreste). En Bourgogne, ces orges sont à 80 % à destination de la filière brassicole. Pour la Franche-Comté, le débouché est réparti pour moitié en orge brassicole et pour l’autre moitié en orge fourragère. Ces surfaces restent stables par rapport à la moyenne quinquennale. En effet, plus de 90 % des orges d’hiver ont été implantées avant l’arrivée de l’épisode pluvieux de mi-octobre. Ces surfaces intègrent les orges de printemps semées à l’automne, en nette baisse cette année à cause des pluies. Les rendements sont décevants en 2024 et se positionneraient au 1er août à 54 q /ha (expertise Arvalis) pour la région BFC, en retrait de près de 10 % par rapport à la moyenne quinquennale.

Début de campagne pluvieux et précoce

L’humidité s’est maintenue durant tout l’automne-hiver, associée à des températures douces. L’année 2024 marque un nouveau record de pluviométrie (dépassant 2013) et de température (dépassant 2020). Les orges d’hiver ont passé l’hiver sans gros épisodes de gel, sous des températures douces : il en a résulté une date moyenne de début montaison à mi-mars, positionnant la campagne 2024 comme une année précoce. Le nombre de talles à plus de 3 feuilles est sur une valeur moyenne. Du côté des ravageurs, les pucerons se sont faits discrets à l’automne mais des symptômes de JNO ont pu être observés en plaine, la douceur leur a sûrement permis un temps de présence sur les parcelles, parfois jusqu’en décembre. Des attaques de zabres ont aussi été observées : ces larves de carabe phytophage vivent dans une galerie verticale creusée au pied de la plante et sortent la nuit pour dévorer les feuilles des plantes (jusqu’à les détruire). Leur présence est favorisée par des rotations céréalières courtes (blé/blé ou orge/blé) et l’absence de labour.

Conditions printanières défavorables

La montaison des orges d’hiver se déroule sous des conditions toujours aussi pluvieuses et peu lumineuses. Cela entraîne plusieurs conséquences :

– Une densité des épis en retrait de 25 % par rapport à la moyenne sur 20 ans. La montée à épis est, au sein de la plante, source de concurrence pour l’azote, l’eau et la lumière. En situation de manque de rayonnement comme nous l’avons connu durant la montaison. La photosynthèse est limitée, et seules les talles les plus développées montent à épis. Il n’est pas rare de voir des taux de régression de talles supérieurs à 50 %. Les excès d’eau ont pu aussi amplifier ce phénomène. Le faible rayonnement engendre un allongement des entrenœuds et donc une fragilité des tiges. Le risque de verse est accru.

– La biomasse produite et la fertilité des grains s’en trouvent également affectées. D’un point de vue physiologique, les céréales d’hiver ont des capacités de compensation des composantes de rendement : un manque d’épi peut être compensé par un bon nombre de grains par épi et aboutir à un nombre total de grains à remplir tout à fait correct. En 2024, les conditions n’ont pas été propices à une compensation : le nombre de grains par épi est globalement dans la moyenne, et cela aboutit à un nombre de grains en retrait de 15 %. La fraîcheur enregistrée à partir de fin avril fait perdre toute avance acquise par les orges : la montaison est allongée, mais ne profite pas à la densité épis. Notons que l’épisode de froid autour du 20 avril a pu impacter la fertilité des épis avec l’observation d’épillets blancs localement. La pluie et l’humidité persistantes apportent également leur lot de maladies foliaires : la rouille naine est précoce, la rhynchosporiose et l’helminthosporiose sont présentes mais relativement contenues, tandis que la ramulariose apparaît fortement en fin de cycle et flambe le feuillage en quelques jours de manière assez précoce, après floraison, soit dès le 20 mai. En parallèle, les conditions météo n’ont pas toujours permis de trouver des créneaux favorables aux positionnements des produits de lutte contre ces maladies.

Désherbage difficile à maîtriser

Il y a eu globalement de bonnes efficacités pour les traitements de désherbage faits à l’automne (meilleures efficacités des prélevées par rapport aux post-levées), pour ceux qui ont pu entrer dans leurs champs. Certaines parcelles n’ont pas pu être désherbées à l’automne avec quelques cas irrattrapables (impasse technique). Les phytotoxicités ont également pu être importantes à cause des fortes pluies, mais in fine les dégâts sont restés modérés. Les adventices ont également profité du temps pluvieux pour se développer, un salissement important des parcelles est observé au printemps. La nuisibilité globale des adventices graminées est sûrement élevée en 2024, à garder en tête pour la gestion du désherbage sur les prochaines années.

Pas ou peu de rattrapage en fin de cycle

La météo qui a suivi la floraison des orges est restée maussade : les orges ont débuté leur remplissage sous un rayonnement limitant, avec des minimums en dessous du seuil critique de 250 cal/m² début mai. Cela a eu pour conséquence de limiter la taille des enveloppes des grains d’orge. La cinétique de remplissage des grains a démarré sur des valeurs assez élevées. En effet, le nombre de grains/m² inférieur à la moyenne « force » l’orge à faire de gros grains. Malheureusement cette cinétique s'est assez vite écrasée pour finir à la récolte avec des PMG moyens. Finalement, les rendements sont décevants surtout en plaine où il manque facilement vingt quintaux, en revanche les plateaux s’en sortent mieux par rapport à leur historique.