Groupement technique vétérinaire
Renouvellement assuré ?
Du 5 au 7 avril se déroulait, à Ouroux-en-Morvan, la seconde édition du séminaire de l’association « Groupement technique vétérinaire junior d’Alfort » (GTV Junior d’Alfort).
Le premier volet du séminaire de l’association « Groupement technique vétérinaire junior d’Alfort » (GTV Junior d’Alfort) s’est déroulé dans le Morvan en 2023 (1). Pour rappel, un groupe d’anciens exploitants en était à l’initiative : Bernard Machecourt (disparu cette année), Pierre Bobin, Florence et Jean-Paul Berlo, Pascal Berg et Lionel Roullier. Ce dernier pointe : « Avec l’aide des partenaires et des vétérinaires, nous sommes arrivés à monter un nouvel événement axé la convivialité et la découverte des besoins et des désirs de chacun ». Ainsi, pour la seconde édition, 17 étudiants, âgés de 19 à 25 ans, ont fait le déplacement du 5 au 7 avril, à Ouroux-en-Morvan. « Six sont revenus, et des nouveaux se sont joints à eux… c’est très encourageant, cela veut dire que la formule plaît » se félicite Florence Berlo, ancienne exploitante et maire de la commune d’Ouroux-en-Morvan. Pour elle, toutes les facettes du territoire devaient, encore une fois, être mises à l’honneur : « il faut leur montrer que nous avons un vrai cinéma, des cafés, des services (médecins, pharmacies, supérettes, écoles, etc.) et un véritable tissu social ». Sur ce point, outre la rencontre avec les habitants durant le marché dominical, les jeunes agriculteurs du canton ont emmené les jeunes vétérinaires faire un paintball… Marjolène Jallois, membre du GTV Junior d’Alfort et participant au voyage, réagit : « Même si l’association réunit les futurs vétérinaires ruraux, les jeunes peuvent encore changer d’avis sur ce point. Donc, avec ce projet, nous pouvons avoir une vision d’ensemble d’un territoire rural, que ce soit professionnellement ou sur tous les autres aspects de la vie (activités de loisirs, soutien entre collègues ou voisins etc.) ». Si les divertissements étaient au programme, d’autres points d’orgue étaient proposés aux jeunes.
Liens avec les pairs
Le premier fut la visite du Gaec des Randonneurs avec leurs propriétaires : Fanny Perruchot et Maxime Guillien (3) accompagnés pour l’occasion par leur vétérinaire. Puis, la Chambre d’agriculture de la Nièvre établit le panorama des activités agricoles du département. Enfin, le troisième rendez-vous fut la table ronde où 12 vétérinaires professionnels du département étaient venus échanger librement avec les jeunes. Durant cet instant privilégié, des thèmes variés ont été abordés comme le souligne Marjolène Jallois et Alexia Allègre (autre étudiante) : « les inquiétudes face à l’installation en zone rurale, le non-renouvellement des générations pour les vétérinaires, la diversification de l’activité avec des éleveurs plus techniques, une discussion globale sur le parcours des vétérinaires présents, le salariat, l’équilibre vie professionnel et vie personnelle, la gestion du stress, la relation avec les propriétaires et/ou les éleveurs ». Elle ajoute que : « les vétérinaires présents semblent être prêts à prendre le temps de transmettre leur savoir et leur passion ; c’est appréciable ». Du côté des vétérinaires, le Docteur vétérinaire Anne Baltazart (Cabinet Vétérinaire Baltazart Thirion à Magny-Cours) pointe : « Grâce à mes responsabilités au sein du syndicat vétérinaire local et des GTV (Groupements Techniques Vétérinaires), j’ai pu avec d’autres professionnels participer à la préparation de cette rencontre. Pour moi, la tenue d’un tel regroupement dans le département a du sens, de même qu’échanger avec les futurs vétérinaires pour comprendre leurs attentes afin de les accueillir au mieux dans nos structures ». Pour le Docteur, ce point est indispensable pour atteindre un maillage durable.
Petite et longue focale
En effet, elle rappelle : « Aujourd’hui, beaucoup de structures vétérinaires travaillent en sous-effectif. Cela engendre de grandes amplitudes horaires à ajouter aux permanences de soins (ou gardes) impératives ; une situation de plus en plus lourde à assumer. Et, lorsqu’une structure vétérinaire ferme ses portes, comme cela s’est produit à Château-Chinon l’année dernière, le travail se reporte sur les établissements voisins ; alourdissant encore davantage la charge de travail. Tout cela pèse souvent sur la fatigue et le moral des vétérinaires en exercice. Ces derniers ont alors moins d’énergie pour accueillir et former des jeunes vétérinaires qui ne se sentent pas alors à leur place. Ces situations gangrènent parfois tout un territoire : une structure qui arrête la rurale ou qui ferme, est parfois suivie sur ce chemin par d’autres. À mon sens, cela est très embêtant car les vétérinaires ont (entre autres) un rôle de santé publique, en participant au contrôle et à la prévention de nombreuses maladies, dont certaines d’entre elles sont des zoonoses (maladies transmissibles à l’homme)… La prise de conscience de l’importance de ce maillage doit être collective ».
Agir pour l’avenir
Finalement, au vu de l’ampleur que prend chaque année cette initiative du Morvan, est-il possible de se dire qu’elle est indispensable pour retrouver ce fameux maillage ? Lionel Roullier sourit : « je ne sais pas s’il y aura les résultats escomptés, mais au moins, nous aurons essayé ! ». Le Docteur Baltazart rebondit : « Je ne sais pas si c’est indispensable. Mais, si nous ne faisons rien, personne ne viendra chez nous ! Alors n’ayons pas peur d’expérimenter en la matière afin de démarquer les points forts de notre territoire pour motiver les jeunes à venir, revenir et rester ! Je pense que pour compléter les événements comme le séminaire d’Ouroux, il peut être intéressant que les jeunes viennent en stage dans nos structures ou participent à d’autres dispositifs comme la semaine de la clinique ambulante (2e édition en octobre) ». Elle conclut : « Il faut rappeler que d’autres départements ont pris la mesure du problème et ont mis en place des dispositifs dans le cadre de la loi DDADUE (4) pour attirer les jeunes vétérinaires : des aides au logement des stagiaires et à leurs déplacements ainsi que des soutiens à l’installation ou encore à l’investissement pour les vétérinaires ruraux en exercice, etc. Malheureusement, la Nièvre n’a pas encore ces outils et j’espère que cela viendra rapidement ». En attendant, l’équipe d’organisation, les vétérinaires professionnels ou les jeunes seraient partants pour une troisième édition… un renouvellement se profilerait-il ?
1. Voir TDB n° 1723 et 1726
2. Conseil Départemental, communauté de Communes, Commune d’Ouroux-en-Morvan, Abeille assurance Corbigny, Groupama, Crédit Agricole, MSA, Chambre d’agriculture de la Nièvre, Gan assurance Château-Chinon.
3 Voir TDB n° 1753
4.https://www.veterinaire.fr/communications/actualites/lancement-dun-nouveau-dispositif-de-lutte-contre-les-deserts-veterinaires ou https://agriculture.gouv.fr/les-collectivites-territoriales-autorisees-delivrer-des-aides-aux-veterinaires-et-etudiants
Ruralité boudée ?
Certains préjugés voudraient que les jeunes générations boudent la campagne. Pour Marjolène Jallois, il n'en est rien : « La vie dans les territoires ruraux ne fait pas forcément peur aux jeunes. Au contraire, ceux qui ont grandi à la campagne (mais pas que !) ont un réel besoin de retourner dans ces territoires après leurs études. Le problème qui se pose est qu’un étudiant sortant d’école n’est pas encore autonome professionnellement parlant. Le premier emploi est un moment charnière pour les jeunes, car ils ont besoin d’être très bien accompagnés et formés par des vétérinaires. Selon nous, il ne suffit pas de prendre la place des vétérinaires qui s’en vont, il faut aussi une transmission de savoirs. Cette relation est aussi très importante, car la première prise de poste nous fait passer d'une vie scolaire très active et très riche en interactions sociales à un endroit plus isolé ; un besoin d'interactions avec nos pairs peut se faire ressentir et ce même si la population locale est un soutien ».