Avec une pluviométrie accrue ces derniers mois, la gestion parasitaire peut devenir complexe. Exemple à Suilly-la-Tour avec deux éleveurs.
Alexis Krebs (SCEA Vallée du Nohain) et Adrien Guyenot ont fait les frais des conséquences de la pluviométrie accrue de ces derniers temps. Tous les deux installés à Suilly-la-Tour, leurs parcelles sont entourées par le Nohain et ses bras qui ont eu tendance à déborder. Une situation qui a ses répercussions puisqu'ils déplorent de nombreux animaux touchés par le paramphistome, avec 6 génisses mortes pour Alexis et deux décédées chez Adrien, début septembre.
Xavier Droui, docteur vétérinaire du groupe vétérinaire Donzy & Co'sne, qui suit les cheptels d'Alexis et d'Adrien, rappelle : « Le paramphistome a besoin d'un escargot d'eau pour passer à la vache (la limnée tronquée). Le cycle de ce parasite est d'un à quatre mois. Classiquement, il est présent chez le bovin et s'installe dans le rumen. Le problème étant que lorsqu'il y a un nombre trop important de formes immatures, cela engendre un amaigrissement du bovin (pouvant perdre environ 1/3 de leur poids), de fortes diarrhées et des mortalités rapides. Majoritairement, ce sont les jeunes spécimens qui sont touchés car les immunités ne sont pas toutes faites. Cette année, je recense environ une dizaine d'éleveurs dans le secteur qui ont eu ce problème. Cela est assez notable puisque nous n'avions pas vu cela depuis environ 6 ans ».
Surveillance indispensable
Xavier Droui développe : « le paramphistome est très insidieux, car il n'est pas toujours repérable rapidement. Cela demande donc une surveillance accrue des animaux. Or, dans le secteur de Suilly-la-Tour, les exploitants sont souvent polyculteur-éleveurs. De par ce statut, durant la période propice au développement de la larve, ils étaient pris dans les cultures ; ils ne peuvent pas être partout. En plus, l'élément très problématique est le peu de moyens de prévention disponibles, avec des vermifuges à utiliser de manière raisonnée car il y a de plus en plus de résistances sur ce type de parasite ». Installé en bio, Alexis Krebs explique d'ailleurs : « Lorsque j'ai retrouvé les génisses mortes, nous avons réalisé une coproscopie, mais rien n'a été relevé car ce sont les formes immatures et non les adultes qui sont responsables de la mortalité. En bio, s'il n'y a pas de signes cliniques, à part faire une cure de minéraux, nous n'avons rien ». En plus de ces pertes, certains animaux des cheptels d'Alexis et d'Adrien peinent à retrouver un bel état : « C'est très compliqué de les faire redécoller, et cela aura forcément des répercussions notamment sur la reproduction ». Alexis Krebs pointe un autre problème : « À cause des prairies qui n'ont pas pu être pâturées, j'ai dû donner du foin à mes animaux, et j'ai éclusé mon stock. Pour finir l'année, je suis dans l'obligation de me procurer du fourrage, ce qui revient à environ 150 tonnes de surplus de fourrage acheté à l'extérieur par rapport à une année normale – type 2021. Donc au-delà de la perte de mes bêtes, j'ai également des frais supplémentaires pour l'alimentation, sans compter les frais vétérinaires et de traitements – indispensables pour aider les animaux survivants ».
Répartition complexe
Parmi les solutions à envisager, Xavier Droui conseille l'installation des plus de 2 ans dans les prairies les plus humides, puisque leur immunité est déjà construite, et pour les plus jeunes les positionner dans les terrains les plus secs. Malheureusement, cette répartition n'est pas toujours réalisable, à l'image d'Adrien : « je n'ai aucune parcelle sèche. La seule solution pour moi sera une surveillance accrue… soit un peu plus de travail ». Comme si cette situation n'était pas assez complexe, les deux éleveurs dénoncent des problèmes d'entretien sur les cours d'eau avoisinants, et ont donc décidé de prendre les choses en main : « nous sommes dans l'attente d'autorisation pour pouvoir entretenir les cours d'eau nous-mêmes, puisque personne ne le fait. Encore un coût financier, et du temps passé que nous ne dirigeons pas sur autre chose ; mais si cela peut éviter un afflux d'eau dans nos parcelles, autant le faire ». Adrien donne un exemple : « pour un curage d'environ 800 m, je vais en avoir pour 4 000 euros… » et d'Alexis de rebondir : « attend vous dire que sur 2 km – comme c'est le cas chez moi – la facture est encore plus salée ». Au total, pour Alexis c'est environ 70 ha de prairies (sur environ 88 ha) qui sont concernées par cette problématique et pour Adrien environ 40 ha (sur 50 ha). Alexis Krebs conclut : « Nous sommes assujettis à l'héritage que nous avons, et nous nous adaptons afin de consolider l'avenir de nos exploitations. Cela est tenable, jusqu'à un certain point ».