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Contractualisation en viande bovine

Foire aux questions sur la contractualisation en viande bovine

La contractualisation continue de susciter de nombreuses questions, particulièrement en viande bovine. Les réponses parviennent au fur et à mesure.

Par Berty Robert

Question générales : 

1 - L'engagement minimum est sur 3 ans, pourquoi ne pas avoir mis un an ?

Le législateur a prévu une obligation de contrat pluriannuel, sur 3 ans au moins, considérant que les agriculteurs font état régulièrement d’un manque de visibilité sur l’avenir pour les prix et leurs revenus. Cette obligation s’applique pour tous les produits agricoles, et n’est pas spécifique à la viande bovine.

2 - Quel est le risque pour un éleveur de vendre sans avoir contractualisé ?

La contractualisation est obligatoire et doit être formalisée selon les dispositions de la loi (notamment ensemble de 7 clauses à faire figurer), autant pour l’acheteur que pour le vendeur. Les pouvoirs publics indiquent que des contrôles seront réalisés, d’abord avec rappel des obligations, puis demande de correction le cas échéant, assortie d’une astreinte en cas de non-réalisation, puis enfin avec possibilité d’application d’une amende administrative pour non-respect des obligations de la loi. L’amende peut alors aller jusqu’à 2 % du chiffre d’affaires de l’acheteur et de l’éleveur. L’éleveur doit donc contractualiser et pouvoir en tout état de cause présenter les « propositions initiales de contrat » qu’il a soumis à différents acheteurs, et la réponse que les acheteurs lui ont donnée. Les acheteurs, les coop et les OP seront contrôlés prioritairement et risquent également une amende jusqu’à 2 % de leur chiffre d’affaires en cas de non-application de la loi.

3 – Quels sont les « effets similaires au contrat individuel » dans le cas de la relation entre un éleveur et sa coopérative ?

Dans les questions-réponses du ministère, il est indiqué : « Le règlement intérieur de la coopérative doit contenir les critères et modalités de détermination et de révision du prix des apports, comprenant les modalités de prise en compte des indicateurs mentionnés à l’article 631-24 choisis pour calculer le prix ».

L’article 521-3-1 stipule également que la coopérative doit présenter en AG un document expliquant « les écarts » entre : 

- le prix indiqué lors de la précédente AG et le prix effectivement payé

- le prix effectivement payé et les indicateurs relatifs aux coûts de production et aux prix de marché

Par ailleurs, l’article 521-3 au point h) stipule que l’organe en charge de l’administration de la coop  a obligation de mettre à disposition de chaque adhérent un document récapitulatif qui informe sur la situation d’adhésion (parts sociales, durée de l’engagement…) et qui précise entre autres « les quantités et caractéristiques des produits à livrer, ainsi que les modalités de paiement et de détermination du prix (…) ». Ce document récapitulatif est à fournir à chaque modification et à l’issue de chaque AG. 

4 – Quel est le délai maximum de réponse par un acheteur à une « proposition initiale de contrat » ? 

La loi (art 631-25, 4°) mentionne que l’acheteur doit donner par écrit motivation du refus ou de réserve sur les éléments de la proposition de contrat initial qu’il a reçu, et cela dans « un délai raisonnable ». Nous sommes en attente de précisions sur ce « délai raisonnable », et pour savoir si cette durée peut être considérée comme d’un mois au plus. 

5 - Ventes d’animaux sur les marchés en vif ?

Les ventes d’animaux sur les marchés en vif sont exonérées de l’obligation de contractualisation. Les négociants sont par ailleurs considérés comme « grossistes » dans le cadre du Code du Commerce (achat et revente de produits en l’état). Ils sont exonérés des obligations de conventionnement quand ils revendent les animaux. En revanche, un négociant qui achète des animaux à un éleveur en ferme doit obligatoirement contractualiser selon les dispositions de la loi Egalim2 « éleveur-premier acheteur », et cela même si ensuite il vend les animaux à un autre opérateur sur un marché en vif. 

 


Formules de prix, indicateurs

1 – Dans le cas d’un prix déterminable, la formule de révision automatique du prix est-elle totalement libre ?

Si la formule est effectivement librement négociée entre les parties, elle doit néanmoins s’appuyer sur les catégories d’indicateurs dont l’usage est rendu obligatoire par la loi Egalim, dont les indicateurs de coûts de production. Une clause prévoyant un prix fixe révisé selon les seuls cours et marchés ne sera donc pas conforme. Il est recommandé aux éleveurs de choisir le « prix déterminable » sur la base des indicateurs coûts de production fournis par l’interprofession. Ce choix est non négociable s’il figure dans la proposition initiale de l’éleveur.

2 - Valeurs des bornes mini et maxi du « tunnel de prix » ?

Elles peuvent être réfléchies en fonction d’indicateurs, mais elles seront ensuite inscrites au contrat sous forme d’une valeur fixe pour la durée du contrat, et la loi ne prévoit pas une actualisation de ces bornes. Il faut veiller à la cohérence entre la formule de prix et les résultats qu’elle donne selon les fluctuations possibles des indicateurs et les bornes du tunnel. Les valeurs des bornes inscrites au contrat sont à considérer comme s’appliquant à « l’animal de référence » du contrat : s’ajoutent donc ou se défalquent de ces bornes les différentes valeurs d’écarts inscrites au contrat (classes de conformation, races, etc.).

3 - Le coût de production établi selon la méthode validée en interprofession inclut-il la rémunération de l’éleveur ?

Oui, le calcul intègre une rémunération du temps de travail équivalent à 2 SMIC annuels bruts par unité de main d’œuvre, rémunération sur base de laquelle l’éleveur doit payer les charges sociales MSA. Le calcul, réalisé par l'Idele sur base d’un échantillon représentatif constant d’exploitations allaitantes de référence du réseau Inosys, est en fait un coût de production (charges courantes opérationnelles et de structures + amortissements + rémunération des capitaux propres et foncier + rémunération du travail) duquel sont déduites les aides de la PAC affectées à l’atelier viande bovine. Ce calcul, et les modalités d’actualisation tous les 6 mois, ont été validés par l’ensemble des fédérations d’Interbev en 2019. Ils sont diffusés via chacune des fédérations.

4 - Existe-t-il des indicateurs pour les surcoûts liés à une démarche filière / un cahier des charges spécifique? 

Pour le cas du Label rouge Gros bovins, un indicateur de surcoût a été établi selon une méthode interprofessionnelle. Interbev a décidé que le calcul sera également mis à jour par l'Idele tous les semestres à même date que l’indicateur du coût de production standard. Pour d’autres cahiers des charges filière, pour lesquels il n’existe pas d’indicateur de référence calculé nationalement, le coût lié aux exigences supplémentaires par rapport au « standard » est à définir entre les parties. 

5 - Quelles valeurs utiliser comme « indicateur de valorisation bouchère / raciale » en animaux rustiques ?

FranceAgriMer ne diffuse pas de cotations concernant les bovins finis de races rustiques, il n’y a donc pas à ce stade de calcul possible d’une moyenne historique comme pour les autres races (charolaise, limousine, blonde). Une demande a été portée auprès des pouvoirs publics. Dans l’immédiat, les parties doivent s’accorder sur une valeur en se référant à des données disponibles localement, ou sur base d’une autre race, ou sur la moyenne de toutes les races.

6 - Si l’éleveur propose un contrat à prix déterminable, l’acheteur peut-il demander de signer un contrat selon un prix déterminé ?

La loi prévoit que l’acheteur ne peut pas s’opposer à l’indicateur de coût de production choisi par l’éleveur dans sa proposition initiale de contrat. Dès lors, si un éleveur a proposé un contrat à prix déterminable, ce qui induit que le prix doit être calculé à chaque vente en fonction de la valeur de l’indicateur de coût de production, l’acheteur ne doit pas imposer en réponse une formule de prix déterminé.

 


Cas particuliers

1 - Vente de bovins par un éleveur en direct à un acheteur étranger : faut-il contractualiser ?

Les produits agricoles concernés par les obligations de contrats sont uniquement ceux « livrés sur le territoire français ». En conséquence, si la livraison des animaux a lieu directement hors France, il n’y a pas obligation de contractualiser. Mais la contractualisation s’impose à un acheteur français, quand bien même les animaux sont destinés à l’export. 

 


2 - Cas des ventes de bovins reproducteurs ?

En attente de l’avis du ministère.

 


3 - Bovins croisés ? 

Les bovins croisés ne relèvent pas de l’application anticipée au 1er janvier 2022, celle-ci s’appliquant aux seuls animaux de races à viande. Les bovins croisés sont donc à contractualiser de façon obligatoire à partir de janvier 2023.

 


4 - Situation pour les ventes de vaches maigres ?

Elles relèvent de l’obligation de contractualisation selon les modalités de la loi Egalim2, au titre d’une vente d’un éleveur à un autre éleveur (qui est le « premier acheteur »). Modalités en attentes (indicateurs…)

 


5 - Abattages d’urgence ?

Ces situations ne relèvent pas du cadre de contractualisation défini par la loi Egalim2.

 


6 - Vente directe exonérée de contractualisation ?

La loi exonère de contractualisation uniquement les situations de vente directe par le producteur au consommateur. 

 


Gestion des quantités inscrites au contrat, force majeure, résiliation

1 - Comment gérer la variabilité du nombre d’animaux à livrer chaque année ?

La signature du contrat engage à respecter la vente (et l’achat) d’un volume inscrit sur la durée globale du contrat, soit ici sur les 3 ans minimum. La FNB a proposé une rédaction du modèle de contrat sous la forme d’une quantité indiquée par an, s’appliquant donc chaque année sur la durée du contrat. Exemple : contrat pour « 20 vaches par an » signifie un engagement pour 20 vaches x 3 ans = 60 vaches. Le modèle de contrat proposé par la FNB assortit cette clause de quantité générale d’une clause complémentaire mentionnant l’accord des 2 parties sur la possibilité de livrer « + ou - .. % (ou + ou - … têtes) chaque année », pour prendre en compte les fluctuations du troupeau (sex-ratio des naissances, variation du taux de mortalité…). 

Exemple : si les parties se mettent d’accord sur + ou – 15 % chaque année, par rapport à une quantité de 20 vaches par an inscrite à l’article relatif aux quantités à livrer, le contrat sera respecté si l’éleveur livre uniquement 17 vaches une année, ou même uniquement 17 vaches chacune des 3 années. Ces fluctuations ne sont pas là pour régler les situations d’impact plus fort, pour lesquelles les conditions de force majeure sont alors à invoquer (définies comme un évènement inattendu et indépendant de la volonté de la partie concernée). 

Par ailleurs, en cas de « changement de mode de production », il s’agit alors d’une des modalités concernant la résiliation du contrat. La loi prévoit (art 631-24 au III, point 7°) que le délai de préavis et l’indemnité éventuellement applicable pour résiliation, sont réduits dans cette situation.

 


2 - Peut-on inscrire une « clause de revoyure » ?

Il est possible d’inscrire une « clause de revoyure » (par exemple à chaque date anniversaire) mais il faut noter qu’elle ne porte que sur l’obligation de se revoir pour discuter d’éventuelles modifications du contrat avant son terme à 3 ans : elle n’induit pas d’elle-même de modification. Tant que les deux parties ne se sont pas accordées pour signer une modification au contrat, les clauses du contrat initial s’appliquent.

 


3 - Comment définir le calendrier de livraison ? 

La préconisation de la FNB est de prévoir un calendrier de livraison large et de définir dans le contrat un « délai de prévenance » de … jours à l’avance par l’éleveur vers l’acheteur pour chaque lot à livrer. C’est cette date de prévenance qui induira l’obligation pour l’acheteur de venir collecter les animaux dans le délai maximal prévu (à défaut l’acheteur s’expose à des pénalités de retard de collecte, à définir au contrat).

 


4 - Y a-t-il des pénalités si l’éleveur ne livre pas les animaux convenus au contrat ?

En l’absence de pénalités expressément prévues au contrat en cas de non-livraison par l’éleveur, l’acheteur pourra se retourner contre l’éleveur pour non-respect du contrat en saisissant le médiateur de la contractualisation, puis le Comité des Différends, puis agir en justice auprès d’un tribunal.

NB : il ne s’agit pas de l’amende administrative jusqu’à 2 % du chiffre d’affaires qui elle est applicable par les pouvoirs publics, si un contrôle met en évidence le non-respect de l’obligation de contractualiser. 

 


5 - Situation d’un acheteur qui demande la vente d’un animal non-prévu au contrat initial ?

Possibilité de l’inclure dans le cadre de la clause de variation de … % des têtes à livrer par an (si cette clause a été inscrite au contrat). Possibilité également de conclure un contrat complémentaire pour l’animal surtout s’il relève de caractéristiques spécifiques différentes des animaux concernés par le premier contrat.

 


6 - Peut-on livrer en une seule fois toute la quantité des animaux prévus au contrat et le considérer clos alors ?

Il ne semble pas y avoir de contre-indication juridique à procéder ainsi, par livraison « en bloc » de tous les animaux inscrits au contrat concerné. C’est toutefois contraire à l’esprit et l’objectif de la loi qui vise à donner de la visibilité à chaque partie, dont à l’éleveur sur les prix à venir de ses animaux.

 


7 - Un acheteur peut-il lui aussi invoquer la force majeure ? 

Oui, la force majeure peut être invoquée par chacune des deux parties, si des situations exceptionnelles et non prévisibles empêchent le respect du contrat.

 


Contrats déjà en place, transmission des contrats

1 - Comment gérer des contrats déjà signés avant la mise en place de la loi Egalim2 ? 

Ces contrats sont à mettre en conformité avec les dispositions de la loi Egalim2 à la date anniversaire du contrat, et au plus tard au 1er janvier 2023.